Le collectif qui gère la ferme de Bassenges a reçu une résiliation de bail fin janvier, cette décision de l’EPFL incarne une fuite en avant à laquelle nous nous opposons depuis que les rumeurs courent, et encore aujourd’hui.

Le mardi 3 juin, pile 9 mois après que Martine Gerber – membre du comité d’Uniterre et députée au Grand Conseil vaudois – ait déposé une interpellation intitulée « La ferme de Bassenges ne disparaîtra pas – chaque ferme compte » demeurée lettre morte, nous avons rejoint les Amiexs de Bassenges et Objectif Climat devant le Grand Conseil vaudois. Ce piquet renforcé avait pour but d’informer et d’alerter les député·es sur la situation critique de la Ferme de Bassenges, menacée d’expulsion au profit d’une extension du centre de mathématiques décidée par l’EPFL.

Alors qu’une exploitation agricole disparaît chaque semaine dans le canton de Vaud, le silence obstiné du Conseil d’État – pourtant tenu de répondre dans un délai légal de trois mois – est inacceptable.

La Ferme de Bassenges représente aujourd’hui un modèle agricole pour l’avenir, de par ses pratiques agroécologiques exemplaires et ses liens étroits avec le monde de la recherche, sans parler des centaines de consommateur·rices concerné·es. Malgré cela, l’EPFL a pris la décision de mettre fin à leur contrat de bail afin d’en faire une extension du centre «Bernoulli». Cette décision condamne la ferme à disparaître fin janvier 2026. De plus, cette opération coûtera 10 millions, alors qu’il existe des solutions moins coûteuses sur le campus !

Nous nous opposons fermement à cette disparition et soutenons le collectif Cambium, qui a saisi la Commission de conciliation en matière de baux et loyers.

Nous exigeons :

  • La reconduction du bail du Collectif Cambium Sàrl pour que le modèle de Bassenges perdure.
  • L’inscription officielle de la vocation agricole des bâtis de la ferme dans les statuts de l’EPFL.
  • Un engagement clair du Conseil d’État pour préserver la ferme.

Photos, discours et plus d’infos par ici et une lettre ouverte à signer et faire signer par là

Prise de parole de notre secrétaire politique Eline Müller

Il y a 10 ans jour pour jour, le 3 juin 2015, à l’autre bout du monde, naissait un slogan que nous connaissons toutes : Ni una menos. Pas une femme de moins.

Hier, en préparant cette allocution, c’est ce slogan que j’avais en tête et auquel j’ai envie de rendre un petit hommage de coïncidence, aujourd’hui. En en changeant qu’une simple consonne : pas une feRme de moins. Ni una menos.

Plus une seule ferme ne devrait disparaître.

 

Hélas, en Suisse, ce sont 2 à 3 fermes qui disparaissent chaque jour. 

 

Dans le canton de Vaud, on parle d’une ferme par semaine qui met définitivement la clé sous le paillasson. 

 

Chaque semaine, une ferme qui disparaît.

 

Une ferme sans repreneur ou repreneuse dans la famille, dont les terres sont cédées à un voisin du métier, forcé de s’agrandir pour survivre, étant donné que les paiements directs, ces subsides de l’État qui maintiennent tout juste les agriculteurs la tête hors de l’eau, sont attribués à l’hectare. Tandis que les prix des productions agricoles, eux, ne veulent tout simplement plus rien dire.

 

Ou une ferme dont l’héritière, pourtant dûment formée, sur les bancs de Marcelin ou de Grange Verney, à l’étable avant le lever du jour ou sur un tracteur avant l’âge, même si elle le veut plus que tout, ne peut parfois pas reprendre une exploitation trop chère, intransmissible ou criblée de dettes, ce qui est courant dans le secteur économique le plus endetté de notre pays.

 

Ou une ferme dont le fils – qui travaille depuis 5 ans sur le domaine, ou depuis 10 ans dans le domaine, ou depuis 15 ans dans un autre domaine – part en dépression au moment de recevoir le plus bel héritage qu’il soit, dans le système le plus délétère qu’il soit. Lucide face au mur devant lui. 

 

Ou une ferme balayée de la carte dans le grand silence qui s’empare des granges qui ont vu un paysan se pendre, dans le grand silence qui s’empare des écuries qui ont vu un cheptel vendu aux enchères.

 

Une ferme démantelée.

 

Dans ce contexte de saignée du monde agricole, il est intolérable qu’une ferme telle que celle de Bassenge disparaisse.

 

Il est intolérable qu’une ferme exemplaire – dont le collectif est constitué de personnes de tous les horizons, une ferme où fleurit la biodiversité, où naissent des enfants, où des apprenties obtiennent durement et fièrement leurs CFC, où de nombreux animaux paissent, labourent et nous nourrissent

Intolérable qu’une ferme qui alimente autant de personnes, disparaisse au profit d’un centre de mathématiques. 

 

 

Faut-il vraiment rappeler que se sont les paysan·nes qui sont garantes de notre survie? Faut-il vraiment perdre notre temps à scruter les démarches d’une institution qui n’a rien fait d’autre que de tenter de verdir son image quelques années? Faut-il vraiment expliquer ici le néologisme : agriwashing ?

 

Je préfère profiter des 2 minutes qu’il me reste, pour rappeler que vous, députées de ce canton, avez des responsabilités face à la population qui vous a élu et qui paie votre salaire pour ce travail.

Et face aux centaines de vaudoises et de vaudois qui cherchent à mettre les mains dans la terre, qui cherchent le sens de leur existences jetées au vent, qui cherchent – et trouvent – les solutions véritables aux changements climatiques, à l’effondrement des glaciers, de la biodiversité et de la société.

Solutions que vous balayez trop souvent, avec dédain et cruauté.

 

Vous avez – entre autres – une mission claire : faire baisser les émissions de gaz à effet de serre de notre canton de 60% d’ici à 2030.

Est-ce que c’est trop tard? Ça n’est pas à moi de le dire.

Est-ce que vous pensez que vous y parviendrez sans toucher à l’agriculture? Ça, je peux vous le dire : non.

L’agriculture suisse est responsable d’entre 15 et 27% des émissions – suivant qui calcule quoi – et plus les domaines agricoles s’agrandissent, plus l’agriculture se spécialise et s’industrialise et plus ces chiffres montent.

Il est impératif, et urgent, de soutenir une agriculture paysanne et locale, et d’écouter les personnes concernées. Vous pouvez encore opter pour des politiques agricoles et alimentaires fortes et audacieuses, comme celles qui promeuvent des prix rémunérateurs pour les producteurs et productrices ou encore pour une restauration publique – crèches, EMS, hôpitaux ET hautes écoles – 100% locale, solidaire, biologique, de saison. C’est un exemple.

Chez Uniterre, on en a encore quelques dizaines sous le coude, si ça vous intéresse.

 

Mais avant tout, il s’agit de sauver toutes les fermes qu’il est possible de sauver.

Et il est possible de sauver la ferme de Bassenges. 

Bassenges peut ne pas disparaître

Bassenges ne doit pas disparaître.

Plus aucune ferme ne doit disparaître.