Les annonces de manifestations récentes sont notamment la preuve éclatante que cette pression s’accroît plutôt que de baisser. Les agriculteurs français ont ainsi lancé un appel à une journée d’action nationale pour le 25/01/2024 pour réclamer des améliorations notoires auprès des politiques.
Pour Véronique Le Floc’h, présidente de l’organisation française Coordination Rurale (CR), les signaux envoyés à la politique sont très clairs : « On assiste à une destruction de l’agriculture : les actuelles manifestations en Allemagne, en France et ailleurs montrent un rejet de l’Europe telle qu’elle nous dicte l’avenir de l’agriculture. La poursuite de cette politique ultra-libérale où se multiplient les accords de libre-échange, les importations de denrées ne respectant pas nos normes représente un vrai danger pour les agriculteurs ».
En Lituanie aussi, les mouvements de contestation se poursuivent. Après avoir allumé des feux de protestation dans les champs à travers tout le pays début janvier, plusieurs centaines d’agriculteurs se rendent cette semaine dans la capitale lituanienne Vilnius avec leurs tracteurs. Parmi leurs revendications figurent des solutions efficaces de la part des représentants politiques pour contrer la crise laitière actuelle.
Les agriculteur.trice.s italien.ne.s ont également prévu d’importantes manifestations. Une mobilisation nationale aura lieu partout en Italie le 30 janvier. Les producteurs italiens entendent ainsi atteindre entre autres une réforme du Pacte vert ainsi que l’arrêt de pratiques de dumping sur les denrées alimentaires.
Ces derniers mois, beaucoup ont pris conscience que c’est justement aux politiques de réagir et qu’ils ne peuvent plus se soustraire à leurs responsabilités et à la confrontation avec la réalité et les acteurs de marché surpuissants comme par le passé. « Il faut instaurer des réformes fondamentales qui mettent un terme au grave déséquilibre dans la chaîne de répartition des richesses au détriment des producteurs.trices », explique le président de l’EMB.
De manière plus précise, cela signifie qu’il faut obtenir que sur le marché, les prix versés aux producteurs soient rémunérateurs :
1. L’application active d’instruments de gestion de crise tels que la réduction volontaire de la production reprise dans l’Organisation commune des marchés ainsi que l’évolution de cet outil jusqu’à son activation automatique en cas de crises naissantes. Le Programme de responsabilisation face au marché joue un rôle précurseur dans cette évolution de la réduction volontaire de la production.
2. Des normes contractuelles européennes concrètes au sein de l’UE sur notamment les volumes et les prix rémunérateurs avant livraison du lait. Celles-ci doivent s’appliquer à tous les acteurs de marché, y compris les coopératives.
3. Une réglementation à l’échelle de l’UE qui rend les prix rémunérateurs obligatoires.
4. Des clauses miroirs strictes pour les importations et des mécanismes de contrôles fiables du respect des règles.
5. Des mesures favorisant l’intensification des regroupements de producteurs pour réduire efficacement le déséquilibre des forces sur le marché.
S’agissant du Pacte vert, un tel cadre de marché est nécessaire pour favoriser la stabilisation des prix sur le marché et permettre aux agriculteurs de se conformer aux exigences écologiques. La production de lait doit être rentable afin que les jeunes générations puissent de nouveau s’installer. « Outre le cadre légal, le soutien des projets portés par des producteurs, tels que le Lait équitable est également important », souligne M. Poulsen.
Rien ne sera possible sans les réformes de marché évoquées, l’European Milk Board est affirmatif à ce sujet. L’Union européenne devrait comprendre qu’il va de son intérêt à bien des égards de prendre au sérieux la colère et les problèmes des agriculteurs. Outre le respect des agricultrices et agriculteurs et le travail indispensable qu’ils fournissent, l’enjeu porte aussi sur la sécurité alimentaire des citoyen.nes européen.nes et en définitive sur la confiance dans les institutions démocratiques. La confiance ne fera que se distendre de plus en plus si ces institutions ne prennent pas au sérieux des sujets qui revêtent une telle importance sociétale. Même dans la perspective des prochaines élections européennes, il est d’autant plus important d’agir de manière efficace et de donner une perspective réelle aux agriculteur.trices avec des réformes profondes du marché.
Contacts :
Kjartan Poulsen – président de l’EMB (EN, DK, DE) : +45 (0)212 888 99
Silvia Däberitz – directrice de l’EMB (FR, DE, EN) : +49 (0)176 380 98 500