Edito de Vanessa Renfer

Le château d’eau de l’Europe n’échappe pas aux bouleversements climatiques. Nous vivons désormais des étés où il fait soif, et cela ne fait que commencer. Paysannes et paysans doivent dès à présent composer avec cette nouvelle donnée : l’eau que nous avons longtemps tenu pour acquise pourrait nous faire sérieusement défaut à l’avenir, et nous allons devoir nous y adapter. Notre énorme consommation quotidienne va en prendre un sacré coup.

Source de vie, l’eau n’a de cesse de nous étonner. De formule chimique extrêmement simple, elle possède la particularité unique de connaître sa densité maximum à l’état liquide, à la température de 4°C. En dessus ou en dessous, elle est plus légère. Elle recouvre près de 70 % de notre globe, par les océans essentiellement, là où la vie terrestre est née. De façon similaire, elle représente peu ou prou la même proportion de notre masse corporelle. Nous avons appris tout cela à l’école.

Mais l’eau recèle bien d’autres mystères, telle cette étonnante mémoire. Une fois polluée, malgré tous nos efforts pour la nettoyer et la revitaliser, elle ne sera plus jamais tout à fait la même. Une hypothèse scientifique qui ne fait pas forcémentl’unanimité, mais qui en tout cas ne peut que nous interroger. Il serait donc impossible de se dédouaner derrière de brillantes avancées technologiques en matière de traitement de l’eau, dans des stations d’épuration toujours plus performantes.

Rare et quasi miraculeuse, l’eau va donc faire l’objet d’une lutte toujours plus âpre pour en bénéficier. L’enjeu est colossal. Il est tout à la fois politique, social, écologique, mais aussi économique. Gouvernements, citoyen·nes et groupes d’intérêt divers vont devoir se mettre autour de la table et anticiper les problèmes qui ne manqueront pas de survenir. L’agriculture paysanne que nous défendons aura dans ce débat une très belle carte à jouer, car nous pourrons mettre en avant des pratiques respectueuses et efficientes. Mais aurons-nous suffisamment de poids face aux intérêts économiques de certains industriels ?

C’est là tout le débat qui se joue, et que nous vous invitons à découvrir dans ce nouveau numéro du journal d’Uniterre, au travers de quelques éclairages très spécifiques. Des canons à neige de Leysin au Mexique, des méga-bassines françaises aux petites fermes de nos montagnes, suivez-nous au fil de l’eau. •︎