Par 61 voix contre 125, le Conseil national a balayé l’initiative parlementaire 22.476 «Protégeons nos agriculteur·rices. Pour un ombudsman agricole et alimentaire», défendue par Mme Delphine Klopfenstein Broggini. Cette initiative parlementaire constituait le fruit d’une longue collaboration entre la co-présidente de l’intergroupe parlementaire pour la souveraineté alimentaire (IPSA) Valentine Python et Uniterre.
Lausanne, le 12 décembre 2023
A travers la création d’un organe de médiation indépendant (Ombudsman), cette initiative avait le mérite de proposer d’améliorer la situation insoutenable dans laquelle se trouvent les agriculteur·rices de notre pays. Les deux géants orange de la grande distribution contrôlent près de 80% du marché du commerce de détail suisse. Cette position de domination sur le marché leur permet d’imposer leurs conditions de production et leurs prix d’achat. Profitant de la forte opacité du système alimentaire et d’un rapport de force totalement déséquilibré, ces grands distributeurs achètent les produits agricoles en-dessous des coûts de production, ce qui met à mal la production indigène. Cet Ombudsman, en tant que médiateur indépendant, aurait pu garantir un meilleur équilibre dans la négociation des prix et permettre une meilleure protection des paysan·nes, confronté·es aux pratiques commerciales déloyales de la grande distribution. Cet organe aurait garanti l’anonymat stricte des agriculteur·rices qui n’osent très souvent pas témoigner, car cela leur ferait perdre leur principal (voire unique) acheteur.
Avec l’augmentation des coûts de production et le pouvoir démesuré de la grande distribution, la situation de la paysannerie suisse ne cesse d’empirer. Cela démontre que, malgré le fort « lobby paysan » qui n’a pas soutenu cette initiative parlementaire (!), le système actuel ne fonctionne pas. C’est également une preuve supplémentaire que les instruments actuels ne protègent pas suffisamment les agriculteur·rices, contrairement aux arguments avancés par le Parlement.
Il est plus qu’urgent de réglementer et réguler le marché alimentaire suisse, dans le but de garantir des prix équitables et rémunérateurs aux agriculteur·rices. Le pouvoir de la grande distribution ne cesse de grandir et cela péjore la situation économique des personnes qui nous nourrissent. Le Parlement est passé à côté d’une bonne occasion de renforcer la protection des paysan·nes, mais a préféré maintenir le statu-quo. A nouveau, c’est la grande distribution qui en profitera !
Le vote sur cet objet parlamentaire a été précédé d’une longue préparation. La rédaction du texte de l’initiative n’a été possible que grâce à une collaboration continue entre la co-présidente de l’intergroupe parlementaire pour la souveraineté alimentaire, Valentine Python, et Uniterre. Nous remercions Valentine Python, ainsi que l’autre co-présidente Isabelle Pasquier-Eichenberger, pour leur engagement sans faille en faveur de la souveraineté alimentaire dans ce pays.